La cour juge que des enfants contaminés en raison de l’ingestion de plomb présent dans les peintures du logement social de leurs grands-parents lors de leurs séjours chez ces derniers doivent être regardés comme des usagers d’un ouvrage public. L’action en responsabilité intentée en leur nom relève donc de la compétence de la juridiction administrative.
17 Compétence
17-03 Répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction
17-03-02 Compétence déterminée par un critère jurisprudentiel
17-03-02-06 Travaux
17-03-02-06-01 Dommages de travaux publics
67 Travaux publics
67-02 Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics
67-02-02 Régime de la responsabilité
67-02-02-02 Qualité d’usager
Préjudices causés à des enfants en raison de l’ingestion de plomb présent dans les peintures écaillées des garde-corps du balcon du logement social de leurs grands-parents lors de leurs séjours chez ces derniers – préjudices trouvant leur source dans un contrat de droit privé : absence - qualité d’usager de l’ouvrage public des enfants : existence – conséquence : compétence de la juridiction administrative
Une enquête environnementale diligentée par l’agence régionale de santé à la suite du diagnostic de saturnisme chez un enfant a notamment permis d’identifier la présence de plomb dans les peintures écaillées des garde-corps du balcon du logement social occupé par ses grands-parents, dans une concentration nettement supérieure au seuil réglementaire de 1,5 mg/g visé notamment par l’article L. 1334-2 du code de la santé publique. Une telle source de plomb, non endiguée par les travaux de sécurisation adéquats, et aggravée par l’effritement des peintures du fait de leur état dégradé, caractérise un défaut d’entretien normal de l’ouvrage public par le bailleur social, à qui il incombait, en vertu notamment de l’article L. 1334-2 du code de la santé publique dans sa version en vigueur à la date à laquelle la contamination a été constatée, de réaliser les travaux de suppression du risque de contamination au plomb.
Les principales victimes, trois enfants mineurs, n’étant pas parties au contrat de location de l’appartement de leurs grands-parents, qui lie ces derniers à leur bailleur social, dès lors que ni les visites fréquentes des enfants chez leurs grands-parents, ni l’hébergement ponctuel, par ceux-ci, des membres de leur famille à l’occasion d’un déménagement ou de travaux, ne conduisent à assimiler les enfants précités à des locataires du logement social occupé par leurs grands-parents. L’action tendant à l’indemnisation des préjudices subis du fait de la contamination au plomb de ces enfants ne peut être regardée comme trouvant sa source dans un contrat de droit privé. Les trois enfants doivent donc être regardés comme de simples usagers de l’ouvrage public que constitue le logement social. L’action en responsabilité intentée en leur nom, en réparation des dommages subis en qualité d’usagers d’un ouvrage public, de même que celle intentée par leurs proches en réparation des dommages qu’ils estiment avoir subis par ricochet, relève donc de la compétence de la juridiction administrative.
Rapp. Tribunal des conflits, 23 juin 2003, Carras et Pierboni c/OPAC de l’Isère, 3355 (compétence du juge administratif pour connaître de l’action en responsabilité des dommages causés par des immeubles construits par des offices publics d’habitations à loyers modérés), Tribunal des conflits, 14 octobre 2013, M. Benaissa c/OPHLM de Saint Dizier, 3916 (compétence du juge administratif lorsque l’action est conduite par un occupant d’un logement social et non un locataire) et cour administrative d’appel de Nantes, 8 mars 2019, Binet c/office public de l’habitat d’Eure-et-Loir, 17NT01182 (compétence du juge administratif lorsqu’action est intentée par une personne ayant rendu visite au locataire du logement social)
Comp. Tribunal des conflits, 23 mai 2005, Orem c/société Habitat Marseille Provence,n° 3449 (lorsque l’action est menée par le locataire du logement social)